L'entrée d'un proche en Établissement d'Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes (EHPAD) représente une transition importante qui nécessite de nombreux ajustements, notamment la fin de la relation de travail avec l'aide à domicile. Ce processus, souvent méconnu, est encadré par des règles précises que tout particulier employeur doit respecter. Voici un guide complet pour vous accompagner dans cette démarche délicate.
Pourquoi l'entrée en EHPAD constitue un motif légitime de licenciement
Un motif réel et sérieux reconnu par la loi
L'entrée en EHPAD d'un particulier employeur constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement pour son aide à domicile. En effet, le contrat de travail a été conclu pour des prestations à réaliser au domicile de la personne âgée. Lorsque celle-ci quitte définitivement son logement pour intégrer un établissement spécialisé, l'objet même du contrat disparaît.
Cette situation s'apparente juridiquement à une suppression de poste, motif parfaitement valable pour mettre fin au contrat de travail. Il est important de comprendre que ce n'est pas un licenciement pour faute, mais une rupture contrainte par les circonstances.
Pour mieux comprendre ce qu'est un EHPAD et son fonctionnement, consultez notre guide complet sur les EHPAD.
Une procédure obligatoire malgré les circonstances
Contrairement à ce que l'on pourrait penser, l'entrée en EHPAD ne constitue pas un cas de force majeure qui permettrait de rompre le contrat sans formalités. Comme le précisent les experts juridiques, pour qu'il y ait force majeure, trois conditions cumulatives doivent être réunies : imprévisibilité, irrésistibilité et extériorité.
Or, si l'hospitalisation ou la perte d'autonomie peuvent présenter un caractère irrésistible, elles ne sont ni totalement imprévisibles, ni extérieures à la personne concernée. Par conséquent, une procédure complète de licenciement doit être respectée, avec toutes les obligations qui en découlent.
La procédure de licenciement étape par étape
1. La convocation à l'entretien préalable
La première étape consiste à convoquer l'aide à domicile à un entretien préalable au licenciement. Cette convocation doit être formalisée par :
- Une lettre recommandée avec accusé de réception
- Ou une remise en main propre contre décharge (signature de l'employé attestant la réception)
Le courrier doit mentionner clairement :
- L'objet de la convocation : un entretien préalable à un licenciement
- La date, l'heure et le lieu de l'entretien
- La possibilité pour le salarié de s'exprimer lors de cet entretien
Un délai minimum de 5 jours ouvrables doit être respecté entre la réception de la convocation et la date de l'entretien. Contrairement au droit commun du travail, le salarié à domicile n'a pas le droit d'être assisté lors de cet entretien.
2. L'entretien préalable au licenciement
Lors de l'entretien, l'employeur ou son représentant doit :
- Expliquer les motifs du licenciement (l'entrée en EHPAD et l'impossibilité de maintenir la relation de travail)
- Écouter les observations du salarié
- Éventuellement discuter des modalités pratiques de la rupture (date de fin effective, organisation du préavis...)
Cet entretien, bien que formel, est aussi l'occasion d'échanger de manière humaine avec une personne qui a souvent tissé des liens forts avec la personne âgée.
3. La notification du licenciement
Au plus tôt deux jours ouvrables après l'entretien, et généralement dans un délai maximum de huit jours, l'employeur doit notifier officiellement le licenciement par lettre recommandée avec accusé de réception.
Cette lettre doit impérativement :
- Confirmer la décision de licenciement
- Préciser le motif exact (l'entrée en EHPAD de l'employeur)
- Indiquer la date de fin du contrat en tenant compte du préavis applicable
- Mentionner les droits du salarié (indemnités, préavis...)
Exemple de formulation du motif : "Cette décision est motivée par mon entrée définitive en EHPAD à compter du [date], rendant impossible la poursuite de notre relation de travail à mon domicile."
Pour plus d'informations sur les démarches d'admission en EHPAD, consultez notre guide sur l'admission en EHPAD.
4. Le respect ou la compensation du préavis
La durée du préavis dépend de l'ancienneté du salarié :
- 1 semaine pour moins de 6 mois d'ancienneté
- 1 mois pour une ancienneté de 6 mois à moins de 2 ans
- 2 mois à partir de 2 ans d'ancienneté
En principe, ce préavis doit être effectué au domicile habituel de travail. Cependant, dans le cas d'une entrée en EHPAD, cela est souvent impossible. L'employeur peut alors dispenser le salarié d'effectuer son préavis, mais doit le rémunérer intégralement. On parle alors d'indemnité compensatrice de préavis.
Le calcul et le versement des indemnités
L'indemnité légale de licenciement
L'indemnité légale de licenciement est obligatoire si le salarié a au moins 8 mois d'ancienneté au jour de l'envoi de la lettre de licenciement. Son montant est calculé comme suit :
- 1/4 de mois de salaire brut par année d'ancienneté pour les 10 premières années
- 1/3 de mois de salaire brut par année d'ancienneté au-delà de 10 ans
Pour déterminer le salaire mensuel de référence, on retient la formule la plus avantageuse entre :
- La moyenne des 12 derniers mois de salaire brut précédant la notification du licenciement
- La moyenne des 3 derniers mois de salaire brut
Si le salarié a travaillé à temps partiel ou avec des horaires variables au cours de sa période d'emploi, le calcul doit être ajusté au prorata du temps de travail pour chaque période.
Les autres éléments du solde de tout compte
En plus de l'indemnité de licenciement, le solde de tout compte doit comprendre :
- Le dernier salaire jusqu'à la date de fin de contrat
- L'indemnité compensatrice de préavis (si le préavis n'est pas effectué)
- L'indemnité compensatrice de congés payés pour les congés acquis et non pris
Ces sommes doivent être versées en une seule fois, le jour de la fin effective du contrat de travail.
Pour comprendre le coût global d'un EHPAD et comment le financer, consultez notre article sur le prix des EHPAD.
Les documents obligatoires à remettre
À la fin du contrat, l'employeur doit remettre au salarié trois documents essentiels :
- Le certificat de travail : attestant de la période d'emploi et des fonctions occupées
- L'attestation Pôle Emploi : permettant au salarié de faire valoir ses droits au chômage (à générer via le site du CESU ou à demander directement à Pôle Emploi)
- Le reçu pour solde de tout compte : détaillant l'ensemble des sommes versées (dernier salaire, indemnités de licenciement, indemnité compensatrice de préavis, indemnité de congés payés)
Ces documents sont indispensables pour que l'aide à domicile puisse faire valoir ses droits, notamment auprès de Pôle Emploi.
Cas particuliers et situations spécifiques
Qui peut gérer le licenciement si la personne âgée est sous tutelle ?
Si la personne âgée est sous mesure de protection juridique (tutelle, curatelle), c'est le tuteur ou le curateur qui devra gérer la procédure de licenciement. Il agira au nom et pour le compte de la personne protégée, en respectant les mêmes obligations légales.
Pour en savoir plus sur les mesures de protection juridique, consultez notre guide complet sur la tutelle et notre guide sur l'habilitation familiale.
Que faire en cas d'hospitalisation suivie d'une entrée en EHPAD ?
L'hospitalisation temporaire ne constitue pas en soi un motif de licenciement. C'est seulement lorsque la décision d'entrée définitive en EHPAD est prise que la procédure de licenciement peut être engagée. Pendant la période d'hospitalisation, le contrat de travail peut être suspendu, mais le salaire reste dû si l'aide à domicile reste disponible.
Pour plus d'informations sur la gestion d'une situation d'urgence, consultez notre article sur la mise sous tutelle en urgence.
Comment gérer la situation si plusieurs membres de la famille sont employeurs ?
Dans le cas où plusieurs membres de la famille sont co-employeurs (par exemple, plusieurs enfants qui emploient ensemble une aide à domicile pour leur parent), chacun devra signer les documents de licenciement. Il est recommandé de désigner un mandataire parmi eux pour faciliter les démarches.
Si vous rencontrez des conflits familiaux dans cette situation, notre guide sur la résolution des conflits familiaux lors d'une mise sous tutelle peut vous aider.
Aspects fiscaux et déclaratifs
La déclaration au CESU
Les indemnités de licenciement doivent être déclarées au CESU, dans la partie "Complément de salaire". Cependant, elles ne sont pas soumises aux cotisations sociales.
Il est important de noter que ces indemnités ne bénéficient pas du crédit d'impôt "Emploi d'un salarié à domicile". Elles constituent néanmoins une charge déductible pour l'employeur dans le cadre de l'obligation légale de licenciement.
Déclaration à Pôle Emploi
Dans l'attestation Pôle Emploi, deux montants distincts doivent être indiqués :
- Dans la case "Indemnités légales de licenciement" : uniquement le montant légal calculé selon les règles précitées
- Dans la case "Total des indemnités liées à la rupture" : le montant total versé, y compris d'éventuelles primes supplémentaires
Cette distinction est importante car elle impacte le calcul du différé d'indemnisation par Pôle Emploi.
Pour connaître les aides financières disponibles en EHPAD, consultez notre article sur l'APL en EHPAD et sur l'aide sociale en EHPAD.
Conseils pratiques pour une rupture respectueuse
Anticiper la situation quand c'est possible
Lorsque l'entrée en EHPAD est prévisible, il est recommandé d'en informer l'aide à domicile suffisamment à l'avance. Sans entamer formellement la procédure de licenciement, cette communication permet au salarié de se préparer à cette transition professionnelle.
Pour vous aider à préparer l'entrée en EHPAD, consultez notre checklist pour la visite d'un EHPAD.
Maintenir une communication bienveillante
La relation avec une aide à domicile est souvent empreinte d'une dimension affective forte. Il est important de reconnaître le travail accompli et de maintenir une communication respectueuse tout au long du processus de licenciement.
Proposer un accompagnement vers d'autres opportunités
Si possible, vous pouvez aider l'aide à domicile dans sa recherche d'un nouvel emploi, par exemple en la recommandant à d'autres familles ou en lui fournissant une lettre de recommandation détaillée.
Pour découvrir d'autres solutions d'hébergement pour personnes âgées, consultez notre guide sur les résidences seniors et notre guide sur l'habitat partagé.
Conclusion
Le licenciement d'une aide à domicile suite à l'entrée en EHPAD d'un proche est une procédure encadrée juridiquement qui ne peut être négligée, même dans ces circonstances particulières. Respecter scrupuleusement les étapes de cette procédure permet non seulement d'éviter d'éventuels litiges, mais aussi de clôturer dignement une relation de travail souvent marquée par la confiance et le respect mutuel.
Si vous vous sentez dépassé par ces démarches administratives, n'hésitez pas à vous faire accompagner par un professionnel du droit du travail ou à contacter le service juridique du CESU qui pourra vous guider dans ces étapes.
Besoin d'aide pour gérer le licenciement de votre aide à domicile ?
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